Les faits

Plus de 200 000 patients, parmi trois millions d’utilisateurs du médicament, ont signé une pétition demandant le retour à l’ancienne formule du Levothyrox, utilisé pour soigner les troubles de la thyroïde. Ils disent souffrir d’effets secondaires extrêmement handicapants.

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), assure que des analyses sont en cours, et que les problèmes sont liés à une « phase de transition ». Le ministère de la Santé, tout comme le laboratoire Merck, excluent de revenir à l’ancienne formule.

Des actions en justice devrainet être menées pour demander le retour à l’ancienne formule.

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Sylvie ne se déplace plus sans sa canne, et ses pas sont de plus en plus hésitants. « Mes jambes ne me portent plus, je suis fatiguée, j’en ai ras le bol. » Recluse dans sa maison, dans un petit village de l’est de la Somme, cette femme âgée de 65 ans explique vivre un enfer depuis le mois de mars. Atteinte de la thyroïdite de Hashimoto depuis 15 ans, elle est arrivée jusque-là à supporter sa maladie grâce au Levothyrox, médicament prescrit aux malades de la thyroïde. Mais son état de santé s’est soudain détérioré au printemps, lorsque la formule du médicament a été modifiée. Perte de cheveux, vertiges, troubles de la concentration, douleurs, palpitations, depuis le mois de mars, comme Sophie, des milliers de patients se plaignent d’effets secondaires extrêmement gênants.

Près de 200 000 d’entre eux, parmi les trois millions de Français soignés au Levothyrox, ont signé une pétition réclamant le retour de l’ancienne formule. Pour l’heure, ni le laboratoire allemand, Merck, ni le ministère de la Santé, n’envisagent cette hypothèse. « La grande majorité des personnes traitées avec le Levothyrox n’a pas d’effets secondaires et trouve un bénéfice avec cette nouvelle formule, beaucoup plus stable que la précédente », a indiqué lundi la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. De son côté, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) estime que les problèmes concernant le Levothyrox sont liés à une phase de transition. Comme Sylvie, les patients victimes d’effets secondaires très handicapants devront donc patienter. « On se fiche de nous », s’étrangle Sylvie, qui pointe également du doigt le manque d’informations du milieu médical. « Ni mon médecin, ni ma pharmacienne ne m’ont informée de ces risques, c’est scandaleux. »

Défaut d’information

Un sentiment partagé par le président de L’Agence du médicament, qui souligne que l’information n’est pas arrivée jusqu’aux utilisateurs. « Nous avons fait notre travail, mais le problème, c’est que certains effets secondaires n’étaient pas prévisibles, et personne ne s’attendait à de telles réactions », justifie Éric Housieaux, président de l’Ordre des pharmaciens de Picardie, qui semble très perplexe.

Les analyses, réalisées en ce moment à la demande de l’ANSM, permettront peut-être d’en savoir davantage. Le problème, pour les patients victimes d’effets secondaires, c’est qu’il n’existe peu, ou pas d’alternative au Levothyrox, hormis le L-thyroxine, un traitement en gouttes très contraignant qui rencontre déjà des tensions d’approvisionnement dans les pharmacies. Pour Sylvie, la seule solution est donc de revenir à l’ancienne formule. « Je veux juste redevenir normale. »

Un rassemblement devant l’Assemblée Nationale, à Paris, est organisé ce vendredi 8 septembre pour demander le retour à l’ancienne formule du médicament.

«Un vrai problèmede santé publique»

Paul-Henri Delarue, avocat au barreau d’Amiens

Vous défendez deux victimes supposées du Levothyrox. Que demandent-elles ?

Ces deux jeunes femmes, originaires d’Arras et Cambrai, souffrent d’effets secondaires apparus avec la nouvelle formule du Levothyrox. Elles demandent simplement à retrouver leur médicament pour pouvoir se soigner.

Comment comptez-vous procéder ?

Nous n’avons pas à ce jour d’éléments de preuve pour établir le lien de causalité. Nous allons dans un premier temps demander au laboratoire et à l’Agence du médicament de rétablir le traitement d’origine. Si ce n’est pas le cas, nous irons au contentieux.

Ce combat ne risque-t-il pas d’être trop long à mener ?

C’est en effet une des difficultés du dossier, on le voit avec le Mediator où l’on commence seulement à évoquer un procès. Mais nous sommes face à un vrai problème de santé publique qui risque encore de prendre de l’ampleur.

Me Paul-henry DELARUE

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